Apprendre les TCC

Découvrir les Thérapies Comportementales, Cognitives et Emotionnelles

Les concepts issus de la première vague des TCC

Le conditionnement répondant

Ivan Petrovitch Pavlov, médecin russe lauréat du prix Nobel de physiologie ou médecine de 1904 a établi le principe du conditionnement répondant également à présent appelé « conditionnement pavlovien » ou « conditionnement classique ».

Un apprentissage automatique pour favoriser la survie de l'espèce

Au cours de l’évolution des espèces, la pression sélective a favorisé le développement de processus élaborés grâce auxquels les individus peuvent établir des relations entre différents stimuli. Des stimuli auparavent sans signification particulière peuvent devenir les signaux qui annoncent des stimuli essentiels pour la survie et déclencher de fortes réactions.
 
Le conditionnement répondant est le fait de
donner une nouvelle signification à un stimulus
en fonction de son association avec un autre
et de réagir aux deux stimuli d’une façon semblable.

Variables et mécanismes

Les réactions inconditionnées

Les éthologistes comme Nikolaas Tinbergen et Konrad Lorenz (lauréats du Prix Nobel de Médecine ou de Physiologie en 1973), ont établi que certains stimuli déclenchent des réactions innées qui favorisent la survie de l’espèce. Ces réactions ne sont pas « conditionnées » par des expériences antérieures, elles ont donc été appelées « inconditionnelles » par Pavlov (ou « inconditionnée »), elles se font de manière réflexe.

L’apparition soudaine ou la modification d’un tel stimulus entraîne « inconditionnellement » une mobilisation de notre attention. Pavlov appelle cela la réaction d’orientation cette mobilisation attentionnelle a pour but de préparer l'organisme à réagir rapidement.

Principe du conditionnement et variables

L'expérience princepts de Pavlov en 1903 sur le conditionnement des chiens va illustrer comment on peut transformer un stimulus neutre (SN) en un Stimulus Conditionnel (SC) par association répétée avec un stimulus inconditionnel (SI).
  1. Le SI utilisé par Pavlov est la nourriture, qui provoque en réponse inconditionnelle (RI) la salivation du chien. On note : SI → RI.
  2. D'autre part Pavlov utilise une cloche dont le tintement n'entraîne aucune réaction de salivation comme stimulus neutre (SN).
  3. Pavlov va de manière répétée faire tinter la cloche peu avant (la contiguité temporelle est importante pour que cela fonctionne) de servir de la nourriture au chien. On note : SI + SN → RI.
  4. On bout d'un moment, le simple tintement de la cloche entraînement une réponse de salivation du chien. On a donc : SC → RC.
Ce type d’apprentissage (implicite) d’une nouvelle signification permet d’expliquer de nombreuses réactions affectives et psychosomatiques chez l'Homme.

C'est un des mécanismes clés qui permet d'expliquer de nombreuses réactions pathologiques (notamment dans les phobies) et dont la compréhension est essentielle dans le cadre des TCC.

L’habituation

L’habituation est la diminution d’une réaction suite à la répétition du stimulus qui la suscite.

Cela permet de libérer l’attention du stimuli et de pouvoir la focaliser sur autre chose.
 
L’habituation est l’un des grands principes utilisé en TCC,
notamment dans les techniques d'exposition.

La courbe d'habituation illustre la variation de la réponse physiologique (ici l'intensité émotionnelle) en fonction du temps d'exposition au stimulus. Typiquement dans le cas des phobies il s'agit d'un stimulus phobogène (suscitant la peur chez le patient) et la réponse est une réponse d'angoisse.

Courbe d\'habituation
On voit que, contrairement à ce que redoute la personne souffrant de phobie ou de crise d'angoisse, la réponse émotionnelle, bien que pouvant être intense et très désagréable à vivre, ne monte pas de manière indéfinie et ne risque donc pas de provoquer le decès (hors problème cardiaque avéré). Au contraire l'intensité émotionnelle finit par atteindre un plateau et, au bout d'un temps, redescend.

A mesure que les expositions sont répétées et (sous réserve de respecter un protocole précis), l'activation physiologique va diminuer, le plateau sera atteint plus rapidement et de moindre intensité, la descente sera également atteinte plus rapidement. Au bout d'un certain nombre de séances d'exposition on aura une extinction de la réponse grâce à une habituation complète.

Il peut également y avoir un phénomène de déshabituation, c'est-à-dire une réapparition de la réponse habituée si le stimulus d’habituation n’est plus présenté pendant longtemps.

Inhibition réciproque et différence avec l'habituation via homéostasie

L’inhibition réciproque est le phénomène qui décrit la présence d'état physiologiques mutuellement exclusifs (l'un inhibe l'autre).

Par exemple on ne peut pas en même temps être :
  • anxieux et relaxé,
  • saoul et sobre...
Une base physiologique clé sous-tendant l'inhibition réciproque en lien avec beaucoup de phénomènes anxieux est le fonctionnement antagoniste de composantes sympathique et parasympathique du système nerveux autonome :
  • Le système nerveux sympathique augmente la fréquence cardiaque, accélère la respiration tout en la rendant moins profonde, dilate les pupilles et stimule le métabolisme.
  • À l'inverse, le système nerveux parasympathique a un effet apaisant sur le corps.
Le Pr Stéphane Rusinek explique les erreurs fréquentes dans l'utilisation des concepts et techniques d'habituation et d'inhibition réciproque dans le cadre d'exposition thérapeutique :

Ce qui fait que l'inhibition réciproque est utile au niveau thérapeutique, est également dû au fait d'une certaine inertie de l'état activé. Se relaxer avant un évènement stressant que l'on souhaite affronter permet d'atténuer le stress ressenti et de réaliser plus facilement des exercices pour maintenir l'état de relaxation. Si la bascule d'un état à l'autre se faisait instantanément il n'y aura pas de bénéfice particulier.

La sensibilisation

Diminution du seuil de déclenchement d’une réponse suite à l’apparition répétée d’un stimulus ou l’apparition d’un autre stimulus.
  • Lorsque les stimuli d’exposition sont trop intenses, fréquents ou persistants, les réactions émotionnelles peuvent s’intensifier.
  • Si mon collègue tapote régulièrement son stylo sur le bureau, je vais m'irriter de plus en plus en intensité et rapidité.
  • Si je rumine régulièrement les mêmes pensées en boucle, je vais entretenir des pensées de plus en plus hostiles.

La sensibilisation a une valeur adaptative : elle va me rendre plus sensible à une situation qui pourrait mettre en péril ma vie.
 
C'est souvent l'intensité du stimulus auquel on est soumis qui va déterminer si notre réaction va être une réaction d'habituation ou de sensibilisation.

Les stimuli de forte intensité créent en général une sensibilisation.

Lors de la thérapie on va donc établir une hiérarchie de situations problèmes selon le degré d'émotion (typiquement angoisse) qu'elle provoque chez la personne :
  • Quand la personne évalue l’émotion au-dessus de 60 % de sa valeur maximale, on a de grands risques d’une sensibilisation.
  • De 30 à 60 %, il est déjà utile de travailler avec son thérapeute.
  • De 0 à 30% on pourra avoir une habituation, ce sont ces situations que l'on va travailler en exposition pour éviter une sensibilisation.
Si l'on se risquait à faire de l'exposition sur des situations cotées à plus de 60% d'intensité, même si la séance se déroulait bien a priori, on aurait en réalité une sensibilisation. 

La généralisation

La généralisation est l’extension du pouvoir motivant d’un stimulus « initial » à des stimuli plus ou moins similaires auxquels il n’a pas été directement associé.

C’est un processus utile pour la survie de l’espèce : il provoque la réaction d’alerte dès les premiers indices d’un changement potentiel.

Note : les processus mémoriels participent à la généralisation car le souvenir stocké dans la mémoire à long terme comprend moins de détails que la situation intitiale.

On observe beaucoup de généralisation dans les phobies non traitées : une personne ayant une phobie des rats peut rapidement développer une phobie de tous les petits animaux à fourrure comme les chats ou certains chiens. Le cas historique du petit Albert (John Watson et Rosalie Rayner) illustre parfaitement un phénomène de généralisation de ce type.

Une expérience de se retrouver coincé longtemps dans un ascenceur dans des conditions stressantes peut amener à une agoraphobie, c'est à dire de souffrir d'anxiété dans des endroits isolés ou des foules, en réalité partout où on risque de se sentir coincé et de ne pas obtenir rapidement de l'aide.

La discrimination

Réagir de façon déterminée à un stimulus et différemment à un stimulus qui ressemble au premier sans être identique.

Pavlov a réalisé l'expérience suivante :
  • Pendant la moitié des séances : présentation d’un son de 1000Hz (SC1) + présentation de nourriture
  • Durant l'autre moitié : présentation d'un son de 900Hz (SC2) sans nourriture.
  • Au début des séances les chiens répondent aux 2 SC, puis seulement à celui de 1000Hz.
Note : les situations qui induisent de fortes réactions de type colère ou peur réduisent sensiblement la capacité de discrimination des stimuli qui présente des similitudes (réaction de focalisation).

L’extinction

La disparition du pouvoir activateur qu’avait acquis un stimulus suite à un conditionnement.

La plupart du temps en thérapie l'extinction est obtenue par une habituation résultant de séances d'exposition.

L'extinction se produit quand l’individu est confronté plus ou moins longtemps à un stimulus et que le SC dont il était devenu le signal de la RC n’apparait plus en connexion avec le SI. Ces expériences doivent être longues et répétées.

La récupération spontanée après extinction : une anxiété peut réapparaitre si la personne n’a plus été confrontée aux stimuli anxiogènes (déshabituation) ou si la personne est particulièrement stressée (cf. modèle de vulnérabilité-stress de Zubin et Spring). Après récupération spontanée, l’extinction sera toutefois plus rapide à obtenir à nouveau.

Effet de sommation

La répétition d’événements subtraumatiques peut avoir le même effet qu’un événement traumatique.

On trouve notamment ce type d'effet dans le cadre professionnel (les risques psychosociaux). Par exemple l'accumulation de stress dû à un environnement de travail bruyant.

Le conditionnement de second ordre

Un stimulus acquiert une nouvelle signification parce qu’il est associé à un stimulus conditionnel.
 

1ère phase :
  • on associe Métronome (SN) + nourriture (SI) ⇒ salivation (RI)
  • on obtient donc Métronome (SC) ⇒ salivation (RC)
2ᵉ phase :
  • couplage répété d’un carré noir (SC2) au métronome (SC1).
  • Après apprentissage, le carré noir (SC2) provoque la salivation (RC), même s’il n’a jamais été directement associé au SI.
Toutefois les réactions vont être moins fortes et être moins durables.

L’effet de préexposition ou « inhibition latente »

Ralentissement du développement d’une réponse conditionnée causé par la présentation préalable du stimulus neutre seul.
 
Utilisation de l’effet de préexposition dans la prévention des nausées causées par la chimiothérapie :
Procédure de préexposition : administrer sous perfusion des substances sans effet émétique avant l’administration de traitement qui en ont. On va ainsi ralentir l'association possible entre la perfusion et le fait de devenir nauséeux.

Conditionnement paradoxal et la réponse compensatoire

Réaction conditionnée opposée à la réaction inconditionnée qui se produit lorsqu’un stimulus est sur le point de produire un déséquilibre dans l’organisme (principe d'homéostasie).

Cette réaction est étroitement dépendante d’un contexte précis auquel on aura été conditionné.

Testez vos connaissances !

Sources

Les informations de cette page sont une synthèse inspirée notamment des sources suivantes :
  • Cours de Mme Marie Thomas, UE «Histoire des TCC», Université de Strasbourg, Master 1 de TCC, année 2016-2017.
Etudiant responsable de cette page et synthèse : Matthieu FERRY

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